Photo d’archive
Il y a bien longtemps, dans une base lointaine, très lointaine, vivait un peloton de nouveaux aumôniers. Ils étaient empressés, enthousiastes et très, très stupides. Du moins, certains l’étaient. Quelques-uns étaient plutôt intelligents et réfléchis – des gars formidables avec qui boire une bière (vous ne devinerez jamais dans quel groupe l’auteur se place).
Un jour, ces aumôniers-en-devenir faisaient des drills sous le commandement d’un sous-officier énergique et intimidant. D’un bout à l’autre du terrain, sous son regard
sinistre et un soleil de plomb, nous marchions (sans talent) jusqu’à ce qu’une plainte s’élève : « Caporal-chef, je n’y arrive pas. J’ai mal à la jambe. »
L’œil de Sauron s’est posé sur cette âme malheureuse. Nous avons tous fait un pas en arrière, craignant le feu et la souffrance. Mais le bon caporal-chef a simplement dit : « OK. Asseyez-vous. Je vais vous raconter une histoire de guerre. » Nous avons donc pris place avec empressement, reconnaissants pour cette pause. Il nous a alors raconté l’entraînement avec les commandos français en Amérique du Sud : la pluie torrentielle, l’humidité poisseuse, la boue omniprésente, les araignées aussi grosses que votre tête, les coteaux escarpés couverts de végétation épaisse. Après quelques jours, il s’était cassé la clavicule, mais il a enduré le reste de l’entraînement, en serrant les mâchoires, en refusant de prendre une pause, déterminé à finir le cours.
Il prononça alors ces désormais célèbres paroles : « Mais j’ai terminé le cours! Et toi, tu t’es fait un bobo?! » Mon compagnon jusqu’ici endolori s’est levé d’un bond en marmonnant « Je vais lui montrer! » et nous avons repris notre drill. C’était le but de l’histoire, bien sûr – il l’a racontée pour susciter cette réaction.
Je me suis souvenu de cet épisode, il y a longtemps, où ce même aumônier (qui a aujourd’hui beaucoup plus de cheveux blancs) avait été invité par ce même ancien caporal-chef (qui est lui aussi beaucoup plus grisonnant aujourd’hui) à parler de résilience dans une Webémission. Il a parlé de ce que signifie la résilience, soit la capacité de se rétablir lorsqu’on est dépassé et mis à l’épreuve. Il ne s’agit pas de demeurer inchangé par nos expériences, nos traumatismes ou nos épreuves, mais d’être capable de plier sans se rompre, comme un roseau dans le vent. Comment faire?
Il a proposé trois tactiques, issues de la recherche :
1) Avoir une vision réaliste de la vie. Ne vous attendez pas à ce que tout soit rose. Lorsque des difficultés surviennent, il faut les affronter! C’est plus que du pessimisme; il s’agit de pouvoir accepter ce qui est, et non ce qui « devrait » être ou de rêver de « et si »;
2) Avoir la capacité de trouver un sens et un but à votre situation. Au lieu de se plaindre que la vie est injuste (voir no 1), la personne résiliente s’accroche à des choses comme les valeurs spirituelles, ou quelque chose de plus grand qu’elle (comme les FAC), et reste donc ancrée plutôt que d’être emportée par le flot;
3) Être capable d’improviser. C’est une tactique que bon nombre d’entre nous ont apprise dans les FAC. C’était notre mantra pendant l’instruction de base : s’adapter et surmonter! Notre personnel d’instruction (tous des fantassins expérimentés) nous l’a enseigné et nous l’avons pris à cœur. Improvisez des solutions comme les techniciens de véhicules qui ont gardé le vieux VLM sur la route à l’aide d’un câble, de pièces de fortune et une saine dose d’espoir.
J’ajouterais d’ailleurs une quatrième tactique : l’humour. Les personnes capables de rire d’elles-mêmes et des absurdités de la vie face aux épreuves sont souples comme le roseau. Nous avons beaucoup ri pendant l’instruction de base – c’était ça ou pleurer.
Alors, lorsque vous faites face à des affectations, à des collègues difficiles, à des problèmes relationnels, à des pressions financières, comment pourriez-vous appliquer ces tactiques dans votre vie?